Autour de la notion d’inclusion: Partie III

Partie III sur III

Par Frédéric Bellenot, chef de secteur, responsable de structures socio-éducatives, à Lausanne
Contact: Frederic.Bellenot@lausanne.ch

Note: Nous publions ici la seconde partie d’un article dense, de Frédéric Bellenot, chef de secteur et responsable de structures socio-éducatives à Lausanne.

Cette première partie est suivie de deux autres .

Ce texte nous a semblé important car il développe d’une manière rare, la question de l’inclusion, en lien avec la construction de la collectivité et non pas d’un point de vue individuel et déficitaire.

La question de l’amitié , dans le développement des relations et constructions éducatives y est également centrale, comme celle de la Communauté.

L. OTT

3/3 AMITIÉS DURABLES

Les phases développées dans le volet précédent décrivent des interactions impulsives, récurrentes et peu structurées. Si l’enfant ne s’inscrit pas dans le temps et l’espace, il rejouera systématiquement la même ritournelle, dans une urgence affective qui l’empêche de se lier. Là, les injonctions à l’ordre ou à la morale n’auront que peu d’effets ou serviront alors son contraire, l’enfant se retrouvant renforcé dans sa maladresse et son sentiment d’échec. La phase suivante semble révéler un aspect clé : elle pourrait permettre à l’enfant de construire un lien solide, une amitié, et commencer peut-être à imaginer sa place au sein du collectif dans d’autres temps que celui de l’urgence.

Phase fusion : l’amitié à tout prix

Qu’y a-t-il de plus précieux que cet unique ami ? Le premier qui vous choisit, sans obligations préalables, et qui vous donne enfin l’impression de ne plus être seul, parmi les autres. 

Qu’entend-on par amitié durable ? À quoi permettrait cette amitié au sein d’un lieu d’accueil ? Dans les phases abordées précédemment, le registre interactionnel, les gestes, les manifestations et les adresses à autrui ne se développaient pas dans une temporalité établie, l’impulsivité dominant sur des formes d’ancrage spacio-temporels. Cette légèreté relationnelle rend les enfants plus vulnérables aux variations, aux changements, et les rend plus susceptibles de se retrouver dans des malentendus liés à la compréhension des enjeux et des règles explicites et implicites dans la structure. À nouveau, plutôt que de s’attarder sur les particularités de l’enfant, sa provenance ou ses éventuels syndromes, il s’agit là de se centrer sur la capacité à la structure de faciliter l’accueil puis l’ancrage de tous·tes dans la collectivité. Un travail initié par les adultes mais qui doit redescendre très vite chez les enfants. Effectivement, la collectivité, dans sa constitution et dans sa stabilisation, doit être aussi portée et favorisée par les enfants. Qui accueille ? Qui manifeste un intérêt d’appartenance ? Qui s’investit et œuvre à l’intérieur de cette collectivité ? Un malentendu important que nous retrouvons dans le domaine de l’enfance s’articule autour de la responsabilité des enfants. Si nous trouvons d’un côté une volonté que l’enfant développe sa performance et sa capacité d’adaptation aux règles institutionnelle (à l’école donc), nous estimons de l’autre que les enfants n’ont pas de responsabilités les uns vis-à-vis des autres, si ce n’est de ne pas représenter une nuisance au développement des camarades. L’incohérence apparente trouve son sens dans une vision de l’individu délié des autres, visant à réussir parmi ses contemporains, dans une lutte et une concurrence qui ne laisse pas de place à une idée de communauté ou de collectif. Il semble très difficile d’imaginer une collectivité empathique et inclusive si le discours dominant l’institution vise l’élévation d’individus parmi les autres, et si l’autre est vécu comme inutile dans sa réalisation ou potentiellement nuisible. Si nous revenons sur la responsabilité collective, adulte et enfants confondus, l’incitation et l’accompagnement doivent amener chaque membre de la collectivité à se sentir concerné par le groupe dont il fait partie ainsi que l’ensemble des individus le composant. Un enfant en souffrance dans le groupe concerne tout le monde, un enfant arrivant de l’extérieur est accueilli par l’ensemble du groupe, un enfant en difficulté enfin doit être soutenu par l’ensemble du groupe. Dans cette perspective commune d’accueil, le renforcement des interactions entre un enfant ayant des difficultés dans son adresse à autrui et d’autres enfants est logiquement primordial. La construction d’affectivités au-delà du spectacle et de la démonstration, si nous reprenons l’idée de phase clown, est un but à atteindre. Pour cela, un regard doit être porté sur l’attention des autres envers l’enfant se donnant en spectacle. Y’a-t-il des moments où l’enfant réussit à jouer un peu de temps avec certains enfants ? Y’a-t-il des enfants qui vont le solliciter et se retrouver à jouer avec lui de manière récurrente ? L’identification du ou des premiers « amis » est primordial. En effet, c’est à travers l’expérience de l’amitié que l’enfant va pouvoir construire un récit au sein de la structure et se construire spacio-temporellement dans cette dernière. Un ami c’est un lien qui va au-delà de la consommation de l’instant, c’est un lien qui peut durer, un ami reste ami en dehors du moment immédiat, de l’interaction spontanée. En termes d’inclusion, c’est peut-être la première question que l’on doit se poser pour l’accueil de chaque enfant, et la question que l’on doit reposer lorsqu’un enfant questionne les professionnel.l.es. Quel est son réseau d’amitié, comment l’ensemble de ses relations se portent-elles, qui sont ses amis ?

Le succès d’une structure d’accueil, d’un collectif, tient beaucoup dans la construction d’une temporalité et de récits partagés.

Réduire l’inclusion au tissu relationnel et aux amitiés. Réduire notre travail comme celui d’un facilitateur et d’un accompagnateur dans la création de liens d’amitiés et de récit partagés. Faire en sorte de pouvoir favoriser l’émergence de souvenirs en commun, qui permettent un ancrage dans la structure et la capacité de se projeter dans un avenir et dans des perspectives réjouissantes. Bien évidemment, selon les contextes, selon les parcours, selon les dynamiques, cette tâche se révèle extrêmement complexe et demande analyse. Nous devons ainsi agir à l’extrême inverse d’une réduction, en complexifiant et alimentant en permanence les projets pédagogiques collectifs et individualisés. Au final, il s’agira bien d’assurer et de favoriser la création d’affinités, de soigner les liens émergeants ou existants, dans le but d’en faire naitre d’autres.

Si nous revenons sur la phase fusion, c’est l’instant où le lien d’amitié durable est possible. L’enfant qui n’a vécu que des interactions impulsives, peu élaborées, et autour d’un besoin de rapprochement avec autrui très fort mais peu structuré, va peut-être, au prix d’efforts d’adaptation et d’une évolution importante, trouver un « copain ». Nous entendons ici par « copain » une reconnaissance mutuelle de l’intérêt porté pendant et en dehors de l’interaction. Un copain, c’est une personne qui reconnaît l’importance de notre existence pour lui et dont nous reconnaissons l’importance de la sienne. J’ai mon copain hier, j’ai mon copain aujourd’hui, j’aurai mon copain demain.L’ami, par cette occasion, donne la possibilité de construire un récit au sein de la structure, en montrant de l’intérêt pour notre existence. Ce copain – personne avec qui on partage le pain – me montre que mon existence a une importance, pour quelqu’un, ici. L’enjeu est de taille, et le copain devient soudain objet de tous les désirs et de tous les risques. L’angoisse peut devenir sujette à élaborer toutes formes de vérifications du lien. Pour un enfant qui a une estime de lui-même basse, il est difficile de croire que quelqu’un puisse avoir de la considération pour sa personne. Il sera difficile de croire que cette personne lui veuille du bien. Pour quelqu’un qui s’est senti délaissé ou abandonné dans son parcours, il sera difficile de concevoir que le copain en face sera encore là demain. De là, nous retrouverons un enfant envahissant dans son lien, dans son attention portée à ce copain, dans le besoin de vérifier et d’être rassuré dans son angoisse de perte. Quitte à faire vivre un enfer à l’autre enfant, en l’excluant des autres, en lui demandant allégeance à travers des pactes ou en voulant diriger absolument tout dans l’interaction et dans les divers jeux. Toutes ces exactions qui se révèlent à la hauteur de l’importance du lien pour l’enfant sont ici révélatrices de la précarité relationnelle dans laquelle se trouve l’enfant, angoissé de perdre ce qu’il a de plus précieux dans la structure (Les relations amoureuses, plus tard, dans leur fusion, sont souvent révélatrices de ce genre d’exaction/vérifications).

Comment dès lors faire baisser cette angoisse chez l’enfant, comment éviter également qu’il étouffe d’une certaine manière l’enfant sur lequel il aura jeté son dévolu ? Comment éviter, en tant qu’éducateur·trice de créer une triade bourreau, victime et sauveur avec le couple d’enfants ?

Comme lors des phases précédentes, l’accompagnement doit pouvoir se faire autour de la reconnaissance de l’existence de l’enfant et des liens existant avec son/ses pairs. Valider, communiquer et valoriser la relation amicale émergeante, rappeler à l’enfant les bons moments, le rassurer sur l’existence et la permanence (il faut le souhaiter) de cette amitié, mettre de l’importance autour de celle-ci. Parallèlement, à travers ces diverses vérifications et maladresses à son encontre, accompagner l’autre enfant pour qu’il puisse communiquer et exprimer ce qu’il ressent lorsque l’autre le frappe, ou lorsqu’il lui demande de ne parler à personne sauf à lui, permettra d’édifier plus facilement une relation stable et équilibrée chez les deux protagonistes. Rappeler les torts et défendre l’enfant « victimisé », remettre en question leur amitié, pire, les séparer pour le bien de l’enfant lésé ne permettra aucunement de faire avancer la relation et de rasséréner l’enfant. Ce qui se joue dans cette relation à deux, c’est autant d’opportunité pour les deux enfants d’apprendre les enjeux des liens affectifs. Doser la relation, comprendre ce qui nous appartient et ce qui appartient à l’autre, savoir ce qui consolide ou ce qui met à mal la relation, trouver la bonne proximité, exprimer son désir ou ses limites. Ces quelques lignes montrent à quel point l’accompagnement dans le développement des sociabilités est complexe mais surtout fondamental pour l’existence.

De manière générale, les adultes (professionnel·le·s, parents ou enseignant·e·s) souhaitent sans y réfléchir que les enfants ne soient pas confrontés à des situations difficiles, complexes ou douloureuses. Dans ce vœu idéal, l’enfant est perçu comme réceptacle de potentielles agressions extérieures (le genre de l’enfant d’ailleurs va avoir tendance à encore plus marquer cela) qui risquent de le traumatiser et entraver son développement. Imaginer un enfant comme un réceptacle passif nie catégoriquement l’enfant d’être acteur dans son existence. C’est dans cette même logique que certains enfants sont séparés d’autres enfants, que l’on essaie d’éviter toute problématiques en ségréguant certains enfants d’autres, pour quelles raisons que ce soit. Si nous revenons à cette amitié « fusion » qui est une étape très importante pour certains enfants, c’est bien celle-là qui va permettre aux deux enfants d’expérimenter la bonne distance relationnelle, la verbalisation de ses émotions et ses besoins, les risques ou encore les peurs associées à cette affectivité. Combien d’humains, tout âge confondus, se retrouvent démunis dans leur relations diverses, coincés car peu armés ou expérimentés lorsqu’il s’agit d’être en relations et de tisser des liens relationnels avec autrui ?

L’éducateur doit permettre aux enfants de cerner les enjeux, de métacommuniquer sur les interactions afin de faciliter la prise de conscience des enfants de leur pouvoir d’agir ou de l’importance de leur parole. Et cela bien en dehors d’un verbiage analytique psychologisant ou colonial sur la typologie familiale ou les origines de l’enfant.

Il y a quelque chose d’universel à l’amitié tout comme il y a quelque chose d’universel à la communauté ou au collectif.

Couper un enfant, qui de plus est identifié comme « en difficulté », de ses premières amitiés sous prétexte qu’il fait du mal revient à l’empêcher d’expérimenter ce qui lui permettrait de sortir de son identité singulière d’enfant « en difficulté ». Il est nié dans ses affects, nié dans sa capacité à évoluer, empêché de tisser avec autrui des relations qui sont celles-là même qui lui permettrait de sortir de son impulsivité et de sa maladresse.

Tout comme l’on entrave plus les petites filles que les petits garçons dans leur mouvement parce qu’on les croit plus fragiles et vulnérables, nous nous retrouvons en éducation à entraver les enfants en difficulté dans leur développement social des interactions qui leur permettraient de s’élever et de sortir du stigmate. Comme pour les petites filles, nous réalisons les prophéties annoncées (dans un cas « elles sont plus fragiles et vulnérables », dans l’autre « ils sont incapables de gérer la relation ») en clivant les enfants d’un espace relationnel et expérientiel qui permettrait de conjurer lesdites prophéties.

Les premiers amis sont fondamentaux dans le développement de chaque enfant. Ils permettent toute sorte d’expériences et d’échanges, et alimentent les souvenirs. De cette mémoire en commun pourra émerger des projections, et un sentiment d’appartenir à une relation avec autrui. Ces premiers liens permettent un terrain de jeu et d’expérimentation multiple. La relation elle-même pouvant être expérimentée, décortiquée, déliée puis reliée, surtout chez des enfants qui ont connu des difficultés dans la création de liens et sont passés par les phases que nous avons pu décrire plus haut. L’enjeu du lien – et son angoisse de perte, en miroir – est parfois tellement important, le stigmate tellement prononcé que différents mécanismes qu’on pourrait résumer à des formes de « loyautés destructrices » remettent l’enfant en difficulté lorsqu’il crée une amitié. C’est à ce moment-là qu’un effort important d’accompagnement et une croyance inconditionnelle à la réussite de l’enfant dans sa relation d’amitié doit être mis en place et montrée par l’ensemble des adultes gravitant autour de lui. Pour que l’enfant puisse petit-à-petit juguler son angoisse, son désir de tester le lien et puisse construire d’autres formes de loyauté à autrui que celles qu’il connaît déjà, et qui l’empêche d’avancer.

Réseau d’amitié, participation et disparition des cas

Un phénomène intéressant que l’on peut observer dans une institution traitant avec l’enfance, c’est la disparition des cas. Par-là, nous entendons des enfants stigmatisés qui peu à peu disparaissent du champ de vision réprobateur des adultes. En colloque, on s’intéresse moins à ce qui a permis à un enfant préalablement considéré comme un souci, préoccupant ou simplement insupportable des raisons de sa disparition dans la collectivité. Pourtant, c’est presque systématiquement l’ouverture à autrui et la création d’un réseau d’amitiés durables qui permet à l’enfant de disparaître. Avoir plusieurs amis ne nécessite plus une garde exclusive et fusionnelle d’un ami, avoir plusieurs amis permet de créer un récit,  avoir plusieurs amis assure que même en cas d’absence de l’un ou l’autre, il y en aura toujours un qui sera là, et qui attestera de mon existence au sein d’un collectif, de mon appartenance à quelque chose. Parfois, le groupe d’amis se construit bon gré mal gré en périphérie du reste de la collectivité, et peut constituer à ce titre en groupe de résistants ou de marginaux, mais ces derniers auront la chance au moins de pouvoir construire des amitiés durables. Aux professionnel·le·s ici de trouver la porte d’entrée qui permettra au groupe de dissidents de passer le seuil de la collectivité, afin qu’il puisse, par exemple, s’engager dans une démarche groupale et participative. 

Les démarches participatives sont autant d’occasion de travailler les liens entre enfants, de tisser un réseau d’affinités plus grand pour chacun·e au sein du collectif. C’est l’occasion également de questionner les hiérarchies implicites au sein de la communauté à travers un travail en commun. L’idée d’œuvrer pour le bien commun autour d’un projet reste un formidable moteur d’appartenance au groupe, qui non seulement va nourrir le collectif et le faire grandir ainsi que chaque individu y ayant participé.

À travers la participation des enfants, à travers les échanges qu’ils auront entre amis, à travers certaines preuves qui attesteront de leur existence au sein de la structure (album photo, calendrier de projet, films etc.) ils feront histoire, ils s’ancreront spacio-temporellement dans le lieu et la collectivité. De là, ils pourront se mettre en perspective, imaginer d’autres ritualités, et se mettre au travail ensemble. Les professionnel·le·s auront ici un rôle prépondérant dans l’accompagnement des enfants à faire histoire, à se rappeler les souvenirs communs, à s’imaginer des projets communs, à expliciter la durée des choses, à rappeler les évènements communs passés et à venir. Se rappeler avec joie certains faits marquants et se réjouir avec impatience de certaines fêtes permet aux enfants de s’inscrire au quotidien dans des démarches qui attestent de leur participation à un dessein commun.

Au final, nos limites.

La notion d’inclusion, outre les multiples charges politiques et sociales qui lui ont été conférées dans les institutions, pose différents problèmes. Son étymologie latine déjà, (inclusio : enfermement), ne laisse pas présager d’heureuses perspectives performatives. En effet, Le mot inclusion nous centre sur l’action d’entrer, sur un  élément extérieur et le mouvement qui lui permet de ne plus être extérieur à la chose visée. Nous l’avons vu avec les phases, la difficulté d’entrée à l’intérieur d’un groupe, de partager, d’être en commun, de se lier est très complexe, et mérite bien sûr une très grande attention. Le cheminement vers l’intérieur doit être construit, pensé et accompagné. Cependant, c’est bien la réalité et les prescriptions intérieures d’un groupe ou d’une entité, sa structure morale, ses buts visés qui constitueront autant de remparts autour de ses frontières. Nous l’avons exprimé sans le dire : l’inclusion n’est rien d’autre qu’un miroir du groupe, de la structure ou de l’entité qui accueille. Il renvoie à sa conditionnalité, il renvoie à sa pensée, sa pédagogie, sa morale, il renvoie à tout le cadre structurel et  imaginaire qui traverse la structure. L’enfant chaotique, l’enfant diabétique, l’enfant allophone ne sont que des occasions de questionner les pensées qui sous-tendent un accueil de jour, une école ou toute autre institution ou un corps de métier qui accueille. Le discours sur la question des moyens, sur-existants dans de telles structures, obscurcit les potentiels formidables déjà présents en leur sein. Il y a des humains, souvent en grand nombre, parcourus d’expériences multiples. Il y a des liens, souvent, existant au préalable. Et puis il y a ce que l’on fait, ce qui nous unit, nos buts, ce qui nous est commun, ce qui est partagé.

En reprenant les stigmates précédents, pourquoi l’enfant chaotique, aussi scientifiquement malade qu’il soit, n’est pas une occasion pour le groupe de parler de son accueil, d’apprendre de cet enfant ce qui le meut, de parler de peur, de diversité de parcours, de mettre en commun, et d’essayer ensemble de trouver ce qui nous permettra de nous sentir unis et bien, par-delà les violences et les manifestations fortes de l’enfant ? Pourquoi l’enfant diabétique n’est pas une chance inouïe d’apprendre le fonctionnement humain, de parler des maladies qui ne partent pas, d’apprendre le rôle de chaque aliment? Pourquoi l’enfant allophone n’est pas une opportunité de devoir reformuler, requestionner les évidences structurelles en essayer de les communiquer différemment ? Pourquoi ne remercie-t-on jamais celleux qui nous ont amené à  devoir surmonter des difficultés, à dépasser nos pensées, à renforcer le groupe et nous amener des quantités d’expériences en mobilisant nos ressources et en développant nos compétences ? L’inclusion doit être vue comme une pratique réflexive libératoire et permanente car elle doit nous permettre d’aborder les confins, les limites de notre pensée et nous mettre au travail, ensemble, pour trouver des solutions communes afin de tendre à un accueil le plus inconditionnel possible. Les missions socio-éducatives réalisées en collectivité permettent d’expérimenter et de réfléchir aux notions de soi, des amitiés et du travail en collectif. Ces trois aspects nous parcourent le temps d’une vie et sont centraux dans notre rapport au monde, dans l’entretien de nos relations, dans nos capacités à se mettre en perspective et trouver du sens dans ce que l’on fait. Malgré l’aspect universel de ces questions, la complexité de la mise en œuvre d’une communauté inclusive, faites d’enfants et d’adultes qui accueillent, nécessite une volonté et une réflexion considérable. L’importance des professionnel·le·s du champ du travail social et de l’enfance est cruciale, et la diversité biographique de ces dernier·ère·s doit, à l’instar de la collectivité dans son ensemble, être un atout et une force plutôt qu’une entrave dans le fonctionnement des structures. Comme des paradoxes, c’est bien la diversité qui « fait commun » et qui nous lie, et c’est la complexité de situations de vie entremêlées et résonnantes qui nous renforce et nous nourrit.

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